Inde

Une ville à Chandigarh (1965)
Alain Tanner
Inde
53′
Suite à la partition de l’Inde en 1947, lors de laquelle la province du Penjab a été partagée entre l’Inde et le Pakistan, l’ancienne capitale Lahore s’est retrouvée en territoire pakistanais. L’architecte Le Corbusier fut chargé de construire une nouvelle capitale, Chandigarh, au pied des premiers contreforts de l’Himalaya. Un an apès la mort du Corbusier en 1965, Alain Tanner commence à réaliser un film dans la cité partiellement en chantier ou même encore à l'état de plans. Mais la métropole compte déjà quelque 120'00 habitants. Architecturalement parmi les plus modernes des villes, Chandigarh a été construite archaïquement à la main. Des impressions de cette ville horizontale et verte - la brique ne permettant pas d'expansion verticale - sont capturées dans de longs plans fixes et de nombreux travellings. Le commentaire de John Berger inscrit cette beauté visuelle dans une réflexion plus large: le climat a fortement influencé les décisions des planificateurs, tandis que la nouvelle cité n'a pas réussi à briser d'un seul coup les anciennes règles sociales. Ces règles continuent de déterminer le niveau d'éducation et de revenu, et les ouvriers qui construisent Chandigarh ne peuvent eux-mêmes pas y vivre. Cependant, le film partage l'optimisme du Corbusier dans sa conception de l'architecture comme instrument qui aide les hommes à clarifier leurs visions, à exercer leurs facultés de discernement et à établir de nouvelles relations, même si les effets ne se feront sentir qu'à long terme.
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Valley of Saints
Musa Syeed
Inde
81′
Dans les contreforts de l'Himalaya, au Cachemire indien, s'étend le lac idyllique de Dal, un lieu plein de mythes où vit le jeune batelier Gulzar avec son vieil oncle, dans un maison sur pilotis. Il gagne sa vie en emmenant des touristes sur son bateau pour des promenades sur le lac. En raison de l'état de guerre qui persiste, mais aussi de la misère, il décide de partir pour New Dehli avec son meilleur ami Afzal. Mais ce plan devra être repoussé en raison d'une interdiction totale de quitter le territoire. Il rencontre alors une jeune scientifique, Asifa qu'il aidera dans son étude écologique du lac. Il tombera amoureux de la jeune fille qui, de son côté, essaie de le sensibiliser à l'extrême pollution subie par le lac. Celle-ci va aussi le pousser à réfléchir à sa décision de quitter son pays natal pour la capitale. Question qu'il se pose d'autant plus qu'il n'a pas le courage d'annoncer à son vieil oncle qu'il va le quitter et que celui-ci devra se débrouiller tout seul.Si les documentaires écologiques sont nombreux en Inde. Les fictions traitant de ce thème sont bien plus rares. C'est qui fait déjà l'intérêt du film de Musa Syeed, avec en plus un angle d'attaque adopté qui présente un intérêt certain, spécifique qu'il est à l'Inde: comment certaines traditions millénaires peuvent arriver à "tuer" un lieu du fait de la surpopulation. Car le lac de Dal se meurt. On voit donc se lier la guerre latente qui règne au Cachemire, la pauvreté qui pousse à l'immigration et, ce qui semble moins toucher les populations, mais n'est pas moins grave: la pollution qui devient un danger presque aussi grand que la guerre. La mise en scène est modeste dans ses prétentions, elle n'en est pas moins complexe par la richesse des personnages, la profondeur des dilemmes auxquels ils sont confrontés, enfin par leur humanité. A tout cela s'ajoutent les images superbes d'un décor majestueux.
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Shiraz (1928)
Franz Osten
Inde
106′
Qui ne connaît le Taj Mahal, ce splendide édifice construit dans la cité indienne d’Agra sur ordre de l’empereur moghol Shah Jahan en hommage à son épouse. Franz Osten s’inspire de cette histoire pour réaliser un superbe drame romantique. Tourné en 1928, restauré, Shiraz n’a rien perdu de sa beauté et sa mise en scène n’a pris aucune ride. Au 17e siècle, en Inde, la petite princesse Arjumand échappe à la mort quand sa caravane est attaquée par des bandits. Elle est recueillie par un modeste potier et élevée aux côtés de son fils Shiraz. Ignorant son ascendance royale, il lui donne le nom de Selima. Les années passent et Shiraz, jeune homme, est fou amoureux de la jeune femme. Celle-ci se fera enlever par des marchands d’esclaves qui la vendront au prince Khuram, futur héritier du trône. Lui aussi éprouve bien vite de la passion pour la jeune femme, au grand dam de Dalia, courtisane ambitieuse rêvant de la couronne. Shiraz, quant à lui, rôde autour du palais dans l’espoir de voir son aimée. Il y a de quoi être époustouflé par cette production indienne du temps du muet. D’abord par l’ampleur et la maîtrise de certaines scènes engageant des centaines de figurants. Par le fait, ensuite, qu’aucune séquence n’ait été tournée en studio, pour respecter la lumière naturelle. Enfin, comparé aux films muets occidentaux de la même époque, les acteurs de Shiraz ont un jeu tout en finesse, sans les mimiques excessives habituelles pour exprimer les sentiments des personnages. Le film préfigure bien ce cinéma à grand spectacle, aux idylles romantiques, qui fera la réputation des studios de Bombay - Bollywood. Par ailleurs, si le film a été dirigé par un réalisateur allemand, Franz Osten, on n’y trouve rien de caricatural dans sa description de la culture indienne. De ce point de vue, Shiraz tient bien la comparaison avec Chang: a Drama of the Wilderness, chef d’œuvre de Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack - auteurs du fameux King Kong -, tourné au Siam un an plus tôt. La musique, composée et jouée par Anoushka Shankar, fille du célèbre sitariste Ravi Shankar, illustre avec maestria ce superbe hommage rendu au Taj Mahal. Martial Knaebel
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Le serviteur de Kali (2002)
Adoor Gopalakrishnan
Inde
88′
Kaliyappan est le bourreau officiel de la principauté de Travancore. Il réside à l'écart d'un petit village situé dans les paysages somptueux du Kerala, car le bourreau ne doit avoir aucune relation avec les personnes susceptibles d'être jugées. Depuis des générations, la famille de Kaliyappan vit des privilèges que lui accorde le Maharadjah après chaque exécution. Mais ces privilèges se font de plus en plus rares, et le vieux bourreau est fatigué d'accomplir une besogne devenue malédiction. «Je travaillais sur un autre projet, en 1989, lorsque j'ai eu envie de faire un film sur les thèmes du crime et du châtiment. Ce n'est que beaucoup plus tard que j'ai lu dans un journal un entretien avec le dernier bourreau du Kerala. J'ai conservé ce texte et un jour tout ce que j'avais lu m'est revenu à l'esprit. Pour ce film qui aborde un sujet un peu particulier, les recherches ont été plus longues que d'habitude. Je n'ai pas voulu commencer à filmer avant d'être entièrement satisfait. Le film soulève la question de la responsabilité. Quand les lois humaines sont incapables d'atteindre la vérité, de désigner le coupable, de le punir, alors que tous savent qu'un innocent est condamné à sa place, qui est responsable? La magistrature, les législateurs, le système gouvernemental, le bourreau ou l'Etat lui-même? À ma connaissance, toutes les sociétés, mêmes les plus avancées, ont été incapables jusqu'à ce jour de répondre à ces questions. 'Le serviteur de Kali' aborde également un problème de société. Initialement concentré sur le crime et le châtiment, le film est devenu plus que cela au fil de l'écriture. Je dirais qu'il traite de la responsabilité individuelle et collective; du péché et du rachat, de la liberté, à la fois réelle et ressentie. Il me permet d'évoquer ma frustration personnelle comme «être social». C'est aussi un film dans lequel je parle de ma terre, le Kerala.» Adoor Gopalakrishnan
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La naissance (1988)
Shaji N. Karun
Inde
108′
Un petit village du sud-ouest de l'Inde. Sous un arbre, un vieil homme qui attend son fils de retour de Trivandrum où il étudie. A la nuit tombée, le bus arrive enfin. Le vieux cherche interroge les passagers, en vain. Son fils n'est pas là. Il reprend alors le bateau pour rentrer chez lui. Les jours qui suivent, c'est le même manège qui recommence: le vieil homme attend le fils aimé, une attente où l'angoisse pénètre, de plus en plus. Jusqu'au jour où il apprend que son fils a été arrêté lors d'une manifestation d'étudiants. Il part alors à Trivandrum. Il s'en suit une longue quête à travers les méandres de la bureaucratie dont il revient bredouille, mais vaguement rassuré par quelques fonctionnaires marrons. Ce sera au tour de la soeur de partir à la recherche du fils et les choses se précisent. Le pire, la mort du jeune homme à la suite de tortures de la police semble de plus en plus évident. De retour, la fille ne sait comment annoncer la nouvelle à son père. Celui-ci n'est de toute façon plus en état de l'appréhender. Il retourne attendre le bus. C'est en revenant sur ses pas qu'il tombe. La folie, la mort sont son ultime refuge.
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My Name is Salt
Farida Pacha
Inde
92′
Chaque année depuis des générations, Sanabhai et toute sa famille s’installent dans le désert du petit Rann de Kutch pour en extraire le sel qui sera revendu pour un maigre pécule. La réalisatrice Farida Pacha a accompagné ce petit monde pendant leur campagne qui dure huit longs mois et leur rend un hommage poétique et chaleureux, s’appuyant sur une mise en scène à la fois intime et somptueuse. Le Rann («marais salé» en gujarati) de Kutch est un immense marais salant situé au nord-ouest de l’Inde, dans l’Etat du Gujarat. Sa surface dépasse les 5000 km2 et se compose de deux parties. Le grand Rann de Kutch, la zone la plus septentrionale, mord sur le Pakistan voisin pour rejoindre l’embouchure de l’Indus. Le petit Rann de Kutch, au sud, s’étend jusqu’au golfe de Kutch qui donne sur la mer d’Arabie. Désertique la plus grande partie de l’année, le Rann est submergé par les eaux au moment de la mousson, isolant ainsi de la terre ferme tout le district de Kutch, devenu une île pour quelques mois. C’est au petit Rann de Kutch que s’installent Sanabhai et sa famille. Ils vont y vivre durant toute la saison sèche pour en extraire le sel laissé par la mer lors de la mousson. Action, suspens. La (très) bonne idée de Farida Pacha est d’avoir laissé de côté tout commentaire en voix off, donnant la priorité aux images et aux actions des protagonistes. Ceux-ci ont parfois des gestes mystérieux, dont on ne comprend pas immédiatement le sens et qui, du coup, retiennent l’attention du spectateur. Pourquoi creusent-ils et quels sont ces objets qu’ils déterrent? Quelle peut bien être le but de ce piétinement rythmé comme une danse initiatique? Le temps passe, la famille de Sanabhai arrivera-t-elle à récolter suffisamment de sel à la fin de la saison? Ainsi, du début jusqu’à la fin du film, le suspens est là, les actions et les situations intriguent, qui donnent un tempo dynamique, même haletant parfois, à tout le film. Déjà, cela suffirait à la réussite de l’ensemble, mais il y a plus: Farida Pacha a ajouté au suspens de l’action la poésie des images. Celles-ci sont superbes, les cadres soigneusement composés, éclairés par une palette de couleurs chaleureuses. Le tout donne une dimension épique au travail de Sanabhai et de sa famille auxquels la réalisatrice rend un hommage affectueux. Martial Knaebel
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La rivière Titash (1973)
Ritwik Ghatak
Inde
157′
La rivière en tant qu'allégorie, en tant que source de toute forme de vie. Par ses innombrables affluents et ramifications, c'est elle qui unit - et sépare - les hommes. Aussi, le rythme lyrique et poétique du film est-il ponctué par le courant de la rivière, le flux et le reflux, les inondations et la sécheresse. C'est par des images d'une force épique prodigieuse que Ghatak dépeint le destin d'un village de pêcheurs. Il nous montre des êtres humains qui, en raison du dessèchement lent mais constant du lit de la rivière, perdent non seulement leur source de vie, mais encore leur identité culturelle. Ainsi, ils tombent sous le joug des représentants de l'Etat qui veulent transformer cette nouvelle terre en rizières. La façon dont Ghatak essaie, par une espèce d'élégie, d'assimiler son profond abattement face à la perte des valeurs traditionnelles et de leurs formes, témoigne de sa souffrance et de son désespoir à la suite de la séparation imposée en 1947 au peuple bengali. Son coeur, en effet, était profondément enraciné dans la partie du Bengale déclarée étrangère. La lutte de tout un peuple pour sa survie constitue le thème de cette oeuvre qui se consacre comme nulle autre à la misère et aux espoirs des Bengalis. Une femme de pêcheur mourante, dans un lit de rivière désertique, cherche de l'eau en creusant un trou dans le sable: une image qui prouve que si la mort est inévitable, la vie finit toujours par avoir le dessus. Chaque fin est à la fois un nouveau commencement.
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Qissa
Anup Singh
Inde
109′
Qissa se déroule dans l'Inde post-coloniale et raconte l'histoire d'Umber Singh, un Sikh qui a dû fuir son village à cause du nettoyage ethnique au moment de la partition, en 1947. Umber décide de lutter contre le destin et construit une nouvelle maison pour sa famille. Quand Umber marie son plus jeune fils Kanwar à Neeli, une fille d'une caste inférieure, la famille fait face à la vérité sur son identité. Ambitions et destins individuels se heurtent dans la lutte avec l'éternité.
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